Emmanuel Macron a trahi le barrage républicain qui lui a permis deux fois d’être élu Président de la République.
En 2017 et en 2022 des millions de Françaises et de Français ont placé dans l’urne un bulletin de vote à son nom. Pas par adhésion à sa mauvaise politique, tant ils savaient qu’elle serait terrible pour la cohésion sociale, pour le pouvoir d’achat des classes moyennes et populaires, pour la justice sociale et fiscale. Pas par affection pour sa personnalité méprisante et arrogante tant on mesure chaque jour l’incapacité du personnage à se hisser à la hauteur de sa charge. Pas pour son parti, créé sur mesure pour lui avec des personnalités sans autre boussole que l’opportunisme tant on voit l’étalage de médiocrités, le vide des convictions, la suffisance et la morgue.
Non, elles et ils ont voté uniquement pour empêcher l’extrême droite de diriger ce pays. Parce que le peuple Français sait quels malheurs s’abattraient si la France basculait. Le parti fondé par Jean-Marie Le Pen et d’anciens collaborateurs des nazis construit depuis des décennies une stratégie pour accéder au pouvoir et appliquer son idéologie. Nul ne peut sincèrement douter qu’une fois cet objectif atteint il ne mettrait pas en œuvre ses politiques, répondant à ses obsessions anciennes et mal maquillées.
Mais la France n’est pas prête à se tourner vers les nationalistes, les racistes. Elle est encore animée par l’amour de l’égalité et la passion de la fraternité.
Élu d’un territoire populaire, je mesure chaque jour la peur de centaines de familles d’être séparées, stigmatisées, menacées par une politique haineuse et discriminatoire. Déjà, les violences et discriminations font partie du quotidien de millions de nos concitoyens. C’est insupportable. Faire pire, ce serait définitivement disloquer la nation, la plonger dans la violence et en finir avec ses valeurs. Ce serait éteindre toute lumière d’espoir et limiter les perspectives d’amélioration concrète.
La seule chose qu’attendaient ces millions de citoyens mobilisés pour battre le RN était que le Président Macron soit le garant des valeurs de la République et une digue face à la marée brune qui submerge déjà la planète et l’Europe.
Qu’a t-il fait de ce serrement conclu avec les Français ? Il l’a déchiré, trahi.
En menant une politique de brutalité sociale et d’amplification des inégalités, de la pauvreté, de l’isolement, de l’abandon des services publics, des solidarités, de la jeunesse, il a renforcé le désespoir et la colère, moteurs puissants de l’extrême droite.
En installant dans le débat public une équidistance entre la gauche, radicale ou non d’ailleurs, et l’extrême droite, il a banalisé et légitimité cette dernière. Il est au cœur de la grande opération de résurrection du vieux slogan « plutôt Hitler que le Front Populaire » qui se manifeste aujourd’hui par une coalition de défense des plus riches et du modèle néolibéral qui englobe le MEDEF, la macronie, LR et les meilleurs porte-voix du grand patronat Français : les amis de Jordan Bardella.
En reprenant si souvent les thèmes et les termes de la famille Le Pen, il a validé ses thèses et donné corps à l’absurde récit médiatique sur la « crédibilité » du RN à gouverner. La loi Darmanin – Ciotti sur l’immigration fut un copié-collé du programme du Front National d’antan. La nomination de Bruno Retailleau, qui s’est fait applaudir par une foule fanatisée au cri islamophobe de « à bas le voile » est la concrétisation de cette faillite morale et politique de la macronie. Le racisme d’atmosphère qui imprègne le débat public, de nombreuses politiques et gangrène les esprits trouve une part importante de sa capacité de diffusion dans le bilan d’Emmanuel Macron.
Pire encore, on apprend dans un livre publié ces derniers jours qu’Emmanuel Macron non seulement pouvait s’accommoder d’une victoire de l’extrême droite après la dissolution qu’il a décidé seul en juin 2024, mais qu’il la souhaitait, l’espérait et a même tenté de la rendre inéluctable.
En effet, les révélations sont claires : Emmanuel Macron a cherché à dissuader ses candidats d’opérer le désistement républicain, seul à même de barrer la route du pouvoir au RN. Il a donc cherché directement, consciemment et activement à favoriser une victoire de l’extrême droite et la constitution d’un gouvernement RN.
Il faut être à des années lumière de la vie des Français pour jouer ainsi avec les conséquences qu’auraient sur leur vie un tel scénario. Il faut être un bien misérable politicien pour faire passer la préservation de son clan plutôt que l’intérêt supérieur de la nation et la défense des valeurs républicaines. Il faut un être un malade du néolibéralisme, idéologue extrémisé pour privilégier le camp des racistes à la gauche du partage et de la dignité.
Monsieur Macron a déshonoré sa fonction et manque à sa tâche historique. Ce n’est donc pas seulement sur le déni de démocratie consécutif aux élections législatives qu’il doit être rappelé à l’ordre, mais sur une orientation politique dangereuse pour la démocratie et criminelle pour la République.
Le fermeté s’impose. L’examen de la motion de destitution en est la seule modalité constitutionnelle. Je suis triste d’avoir à en arriver à cette conclusion, parce que je mesure la confusion qui règne et le risque du pire. Mais celui qui a installé le chaos est aussi celui qui le désire le plus. Apaiser la nation passera par une épreuve de force démocratique avec celui qui ne comprend et n’use que de cette force contre le peuple Français, ses corps sociaux et ses représentants au Parlement.